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ARCHIVE
Ceci est une archive de mon ancien blog Defense de me faire travailler.
Voici la petite lettre que j'ai envoyée à mes responsables pour leur rendre compte du déroulement de mon stage. Bonne lecture.

Bonjour,

Je finis mon stage chez Atos dans quelques jours. J'aimerais profiter de l'occasion pour vous faire un retour sur la façon dont j'ai vécu mon stage dans cette entreprise. Je vais bien évidemment me focaliser sur les points qui m'ont surpris. Je parlerai des tracas que j'ai eus avec ce stage et de mes déceptions. Si vous recevez ce mail, c'est que vous avez pris part dans mon recrutement ou dans le suivi de mon stage, vous êtes donc directement concernés.

Mon premier contact avec Atos a eu lieu dans le camion de l’Atos Campus Tour, sur l’Insa. J'ai rencontré Pascal. Nous avons beaucoup parlé du déroulement et du contenu des stages, sans nous attarder sur un sujet particulier. Le point de vue de Pascal correspondait tout à fait au mien. Pour moi, un stage est une période de formation, d'apprentissage et d'amélioration. Le but principal est de faire évoluer le stagiaire. Ce dernier doit apprendre. L'entreprise est là pour assumer son devoir social de formation de ses futurs employés. Dans la majorité des cas, le travail du stagiaire n'est pas vain. Sa production, bien que moindre que celle d'un employé, n'est pas négligeable. Elle apporte donc de la richesse à l'entreprise et mérite donc salaire (généralement pas très élevé).
J'ai trouvé que les stages d'Atos étaient intéressants parce qu'ils proposaient tous un véritable projet à mener du début jusqu'à la fin. L'opportunité de stage, à laquelle j'ai répondu, mentionne bien un stage de 6 mois qui comporte plusieurs missions (étude, veille technologique, conception, réalisation, documentation, formation) pour un seul et unique projet. Je me suis imaginé à la tête de mon projet, un projet de grande ampleur, pour occuper un stagiaire motivé pendant 6 mois. Cette conception du stage m'allait bien, je voulais découvrir le travail en SSII. J'ai choisit un sujet (que j'ai joint à ce mail) et j'ai déposé ma candidature.
Quelques jours plus tard, je rencontre Jacky. Nous sommes le 31 octobre, le stage n'est encore que dans quelques mois, mais je suis enthousiasmé. Les personnes que je rencontre sont sympathiques. On me confirme que je travaillerai pour l'ANPE sur le projet choisi. Je précise que j’ai apprécié d’autres sujets et que donc, s'il le fallait, je pourrais changer de sujet si l'on conserve les caractéristiques techniques qui m'intéressent : le front-office et le Java principalement. Le discours sur les stages n'a pas changé, nos points de vue sont convergents, le courant passe bien, la discussion dure. Tout se passe bien lors de cet entretien.
Quelques semaines plus tard encore, Sophie me recontacte pour me confirmer votre proposition de stage que j'accepte. Je demande alors à commencer mon stage un peu plus tôt, pendant les vacances de Pâques, pour l'interrompre quelques jours pour mes examens de fin d'année. Le but était de démarrer plus tôt, de finir à la même date, pour disposer ainsi de quelques jours de vacances pendant l’été. On me répond alors "Nous vous proposons un stage à temps plein de 4 mois afin de vous confier un véritable projet. Des absences pour partiel et vacances au cours de ce stage perturberons le bon déroulement de celui-ci". C'est dommage pour mes vacances, mais je comprends. J'ai un véritable projet, je dois assumer.

Mi-mai, j'arrive au 107 boulevard Vivier Merle, il est 8h30. Patricia m'accueille, on me demande d'attendre. Quelques minutes plus tard, Éric arrive. Il m'explique que la personne qui devait m'accueillir est absente et qu'il va donc s'occuper de moi. Je trouve cela étrange, Stéphane, mon tuteur aurait du être présent. Il aurait pu envoyer un mail pour me prévenir. J’ai bien essayé de le contacter quelques jours avant le stage, mais je n’ai jamais eu de réponse à mon mail. Je fais le tour des bureaux. Je croise Stéphane qui m'explique que j'ai changé d'équipe et qu'il ne pourra pas s'occuper de moi. Je regrette de ne pas avoir été averti, c'est assez peu courtois, mais bon ce n'est pas important. Je continue la visite. Éric m'explique le fonctionnement de la BU, de l'équipe, de notre client : la CNAF. Je m'étonne encore une fois. Je vais réaliser une application pour l'ANPE dans une équipe qui s'occupe de la CNAF ? La réponse va vite arriver. Je suis en charge de la correction de bugs dans l'application de génération de statistiques de la CNAF. Ce n'est qu'un début, ca devrait durer une semaine puis je continuerais sur autre chose. J'explique que je m'attendais à avoir un seul projet. On m'explique que ce sera toujours sur l’application "statistiques DSP2" mais que les tâches seront différentes.
Après seulement une heure dans l'entreprise, je peux faire un bilan : je n'ai pas été tenu au courant des modifications qui concernent mon stage, j'ai été changé d'équipe, j'ai changé de client, j'ai changé de sujet et personne ne m'attendait. Le pire n'est pas là. Je m'attendais à effectuer un projet de 4 mois dans le front-office en Java et j'ai récolté une myriade de mini-projets et de corrections de bugs à durée indéterminée sur une application en back-office en perl ! C'est à peu près l'inverse de ce que j'avais demandé. La seule chose qui reste c'est le travail en SSII. Je note au passage la totale désinvolture de l'équipe face à mon stage : je n'ai été tenu au courant de rien, ma convention de stage (signée par Atos) indique la mauvaise équipe, le mauvais tuteur, le mauvais sujet. Rien n'est correct à part le nom de l'entreprise. Je me sens piégé. Je n’ai plus le temps de chercher un autre stage puisque je dois effectuer un stage de 4 mois et que la période ouverte au stage est de 4 mois et une semaine. Je suis déçu de mon stage. Je me sens trompé. Ce stage commence mal.

Dès le lendemain matin je vais trouver ma responsable, Claire. J’ai passé une partie de la journée précédente à demander des conseils à mon entourage et à mes professeurs sur la conduite que je devais adopter et sur les possibilités qui m’étaient ouvertes. Je décide d’en parler ouvertement avec Claire. Je lui expose ma situation, ma déception face à ce stage qui ne correspond pas à mes attentes. La réponse est en demi-teinte : je dois continuer mon projet actuel (les statistiques) mais ce n’est que temporaire. J’aurais une réponse définitive la semaine suivante. Étant pris au piège, j’accepte. Je travaille donc sur ce sujet qui ne m’intéresse pas et qui ne m’apprend rien sur les thèmes que je voulais aborder pendant mon stage.
La semaine suivante arrive, Claire me confirme que je vais changer de sujet. Je travaillerais sur une application d’e-mailing. J’ai très peu de détail sur le sujet. Face à mes doutes, on m’assure que le projet durera jusqu’à la fin de mon stage. Je commence donc lentement à migrer sur ce nouveau projet. Il ne correspond toujours pas parfaitement à ce que je voulais faire, puisque c’est toujours du back-office, mais il a le mérite d’être en Java. La migration est lente, pendant de longues semaines, je vais encore passer du temps sur les statistiques, pour régénérer les données erronées, répondre au client…
Je commence à m’approprier le sujet que l’on m’a trouvé. J’ai une tâche précise : remplacer un outil existant. Il me reste à trouver les informations nécessaires et à réaliser le nouvel outil.

Commence alors une autre déconvenue : je me retrouve seul. L’équipe est surchargée de travail, certains employés démissionnent. Eric, mon tuteur, commence ses journées aux aurores et les termine tard dans la nuit. Avec ce rythme, il est difficile de trouver quelques minutes dans son emploi du temps pour lui poser des questions, lui présenter mon travail ou lui demander de l’aide. Je reste régulièrement bloqué quelques jours sur des problèmes par manque d’information. Eric n’est pas disponible, tous mes collègues sont débordés, je reste sans réponses. La conclusion est simple, mon tuteur (qui n’est pas celui d’origine) n’a pas le temps d’être tuteur. Il ne peut pas dégager le temps nécessaire à un stagiaire pour que son stage se déroule dans les meilleures conditions possibles.

Ma recherche d’information dure longtemps. Je cherche des informations sur l’ACM, aussi connu sous le nom de Worldline Push. Beaucoup de personnes ont une petite part d’information, mais personne ne peut répondre à toutes mes questions, loin de là. On m’assure tout de même que l’ACM sera rapidement prêt pour la production. La recherche de la moindre information est une longue quête qui n’arrive pas toujours à bout. C’est l’une des choses qui m’a le plus étonné. Je pensais qu’une SSI aurait une gestion de l’information beaucoup plus pointue. Ici les informations sont souvent erronées, incomplètes ou obsolètes. C’est très déconcertant pour quelqu’un qui arrive dans l’entreprise. Je m’attendais à trouver une information claire et organisée. Je trouve une nébuleuse de wiki et de sites divers, les informations sont régulièrement dupliquées, il faut alors prier pour utiliser la version la moins obsolète.
Dans mon cas, la documentation sur l’intranet était quasi-inexistante. Il m’a fallu interroger les personnes que l’on m’indiquait au fur et à mesure. Les informations arrivaient au compte-goutte. Ce n’est qu’au bout de deux mois de travail, lorsque le développement avait commencé, que j’ai appris par hasard une information capitale concernant l’ACM. J’ai appris l’existence d’une fonctionnalité que très peu de personnes connaissaient. Cette information a remis en cause la majorité de mon analyse. Tout le développement commencé était devenu inutile. J’ai recommencé le projet from scratch. C’était au début du mois d’août. Le planning du nouveau projet indiquait que je terminerai le projet deux semaines avant la fin de mon stage.
Sans aucune considération pour mes souhaits, mon nouveau responsable, Yann, me demande de me replonger dans les statistiques pour en faire une cartographie, en parallèle de mon projet actuel. Tâche longue et ingrate puisqu’elle nécessite de relire le code écrit par d’autres personnes dans des langages que je ne maitrise pas bien. J’essaye d’expliquer que cette tâche ne m’intéresse pas et que je ne lui trouve aucun intérêt pédagogique. On m’explique que ce n’était pas une question : ma prochaine mission sera la cartographie, que je le veuille ou non. Encore une déception, visiblement mon équipe ne comprend pas que je ne suis pas salarié, mais stagiaire. Mon but est de me former, pas de faire le travail ingrat de l’équipe. Malgré moi, j’hérite de cette tâche que personne ne veux effectuer. Peu importe que cela me déplaise, de toute façon je partirai à la fin de mon stage. Mon temps n’a pas la même valeur que celui de mes collègues.

Maintenant mon stage se termine. J’en fais un bilan très mitigé. J’ai acquis des connaissances dans certains domaines, j’ai travaillé avec quelques framework connus… mais j’en garde néanmoins le goût amer d’avoir assez mal vécu cette expérience. Je me suis senti piégé (par le changement de sujet), abandonné (sans personne pour m’aider), perdu (à cause de l’organisation de l’information) et exploité (puisque je n’ai pas d’influence sur le choix de mon travail).
Ce stage ne correspond absolument pas à ce que j’imaginais avant d’arriver. J’en garderai un souvenir médiocre, une image d’entreprise à la responsabilité sociétale quasi-nulle. Je regrette d’avoir effectué mon stage chez Atos, mais je n’en tiens pas rigueur à mes collègues.

Je ne pense pas être un cas totalement isolé. Tous les stagiaires que j’ai rencontrés ne se sont pas plaints, mais je n’ai pas forcément abordé le sujet. Ceux avec qui j’ai discuté ont aussi un bilan mitigé allant de moyen à vraiment désagréable (demandez à François qui devait initialement travailler sur Flex mais qui a créé des scripts perl pendant 3 mois).
Je pense qu’il y a une réflexion à mener. Il me semble évident qu’il est totalement incorrect de tenir un discours face aux futurs stagiaires pour ensuite en changer dès qu’ils intègrent l’entreprise. Ce n’est pas comme cela que l’entreprise réussira à recruter l’armée de jeunes diplômés dont elle a besoin.
Je ne suis pas là pour créer des ennuis (sinon c’est au conseil des prud’hommes que j’écrirais), mais j’essaye de partager mon expérience pour éviter que d’autres stagiaires n’aient à subir les mêmes déconvenues.

Si vous souhaitez en discuter, pour m’éclairer sur des points que j’aurais mal perçus, je suis ouvert à toutes discussions.